Vivre ma ville : Tokyo
Johann Fleuri vit à Tokyo, capitale du Japon, depuis 2015. Elle est l’auteure du guide Portraits de Tokyo paru aux éditions Hikari en 2017. La journaliste française parle japonais. Son métier lui a permis de mieux comprendre la société parfois très codifiée de ce pays d’Asie. Entretien.
En Europe, nous avons souvent une vision très partielle de la capitale japonaise. Avec ses 9 millions d’habitants (30 millions avec la couronne), on imagine souvent une ville stressante et surpeuplée… Et vous, quelle est votre vision en tant que résidente ?
Je trouve que c’est extrêmement réducteur. De l’étranger, on imagine Tokyo comme une fourmilière agitée, où les habitants sont pressés et stressés. Oui, les Tokyoïtes travaillent beaucoup, souvent tard. Oui, les heures de pointe dans le métro sont à éviter ! Mais je veux tordre le cou à ce stéréotype. Tokyo est une ville agréable à vivre où l’on peut se balader, dans les rues, les parcs et les jardins et beaucoup de quartiers sont très calmes. De plus, la capitale japonaise n’est pas polluée. Les Japonais sont très respectueux de l’environnement et il y a beaucoup de voitures électriques. Il y a ici une force tranquille qui m’a plu tout de suite. Pour moi, Tokyo est surtout une agglomération de villages où chaque quartier a une identité très forte. La mégapole compte 23 arrondissements. Shinjuku, par exemple, est un quartier d’affaires qui abrite le siège de nombreuses grandes sociétés et de grands centres commerciaux. Takadanobaba, où je vis et qui fait partie de Shinjuku, a davantage de maisons basses et une population plus étudiante. C’est aussi un quartier connu pour ses restaurants de ramen, ces bouillons à base de poisson ou de viande, avec des pâtes et assaisonné au miso ou à la sauce soja.
Quelles visites ou balades conseillez-vous ?
Tokyo n’est pas Kyôto, ville aux multiples temples et sanctuaires où certaines visites sont vraiment incontournables. Ici, sachez que vous ne pourrez pas tout voir. Bien sûr, il y a le magnifique sanctuaire shintoïste Meiji-Jingu que j’aime beaucoup. Je conseille aussi souvent le marché aux poissons de Tsukiji. J’adore l’ambiance. Il y a d’un côté le marché professionnel, le plus grand marché de gros pour les poissons et les fruits de mer au monde. C’est un peu le bazar, tout le monde est très affairé mais c’est fascinant. A l’intérieur, allez vous perdre dans le dédale de ruelles qui abritent de nombreux restaurants où vous mangerez du délicieux poisson frais. Attention, la partie professionnelle de ce marché mythique va bientôt déménager.
Mais je conseillerais davantage des visites par quartier. Vivre l’expérience de Tokyo, c’est aller se perdre sans inquiétude. Par exemple, Yanaka : c’est un quartier populaire de l’ancien Tokyo, très agréable et calme, avec des cafés sympas et un cimetière très connu pour ses cerisiers en fleurs au printemps. Vous y découvrirez aussi des temples et des sanctuaires.
Autre lieu, celui-ci très moderne : le musée Top, le musée de la photographie à Ebisu. On y découvre des photographes japonais contemporains mais aussi, à travers les rétrospectives qui y sont régulièrement présentées, d’anciens photographes intéressants et donc l’histoire du Japon. Le musée propose également des expositions de photographes occidentaux. C’est un grand bâtiment très moderne, rénové récemment, avec un petit café où vous pourrez vous relaxer.
Quel est l’endroit que vous aimez fréquenter quand vous avez du temps libre ?
J’aime beaucoup le onsen Sakura, dans le quartier de Sugamo au nord de Tokyo, pas loin de chez moi. Les onsen sont des bains thermaux japonais, à ne pas confondre avec les sentô, bains publics qui n’utilisent, pour la plupart, pas d’eau thermale, tous séparés pour les hommes et les femmes. J’y vais surtout l’hiver. L’été, je n’aime pas la chaleur des bains chauds, la température est assez élevée à Tokyo ! C’est un très bel endroit pour se ressourcer et se relaxer, avec un petit jardin japonais magnifique. Il n’est pas très connu, vous y serez tranquille.
Le sentô est davantage utilisé comme une salle de bain (au Japon, certaines personnes âgées n’ont toujours pas de salle de bain chez elles) : les Japonais vont au sentô le plus proche, plusieurs fois par semaine. Ils y retrouvent des voisins ou des amis. C’est un lieu de socialisation très important dans la culture nippone. On y respecte certaines règles de bienséance comme ne pas faire de bruit, ne pas se savonner dans le bain public mais toujours se savonner et se rincer avant d’entrer dans le bain.
Doit-on connaître d’autres règles quand on arrive au Japon pour ne pas commettre d’impair ?
La société japonaise est très codifiée mais on comprend que vous ne pouvez pas toujours les connaître en tant qu’étranger. Dans un restaurant par exemple, il ne faut pas parler en agitant ses baguettes avec les mains, ni les planter dans son bol de riz car ce signe est associé aux rites funéraires. Dans un temple, il vous faudra retirer vos chaussures et rester silencieux. Lorsque vous saluez un Japonais, il est inutile de s’incliner comme pensent les Occidentaux (cela reste réservé aux Japonais y compris lors de rencontres professionnelles). Un salut respectueux de la tête suffira. On serre la main d’une personne que l’on connaît. Il ne doit pas y avoir de contact physique avec quelqu’un que l’on ne connaît pas. Et puis je conseille aux visiteurs l’apprentissage de quelques mots essentiels de politesse en japonais avant leur arrivée. Ce sera très apprécié !
- Recueilli par Sabrina Rouillé.
Le plat préféré de Johann
Le chazuke : c’est un bol de riz avec du poisson cru. Il est servi avec le dashi, un bouillon chaud à base de poisson séché et d’algues, servi dans une théière, que l’on verse sur le riz. Le chazuke peut aussi être servi avec du thé vert ou plus simplement de l’eau chaude.
La friandise préférée de Johann
Le warabi mochi : le warabi mochi est une sorte de mochi gélatineux, différent du mochi traditionnel (une préparation à base de riz gluant). Le warabi mochi se mange avec des glaces ou de la poudre de soja grillé, le kinako.
Retrouvez le Guide Portraits de Tôkyô sur le site des éditions Hikari
Laisser un commentaire